Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome I, trad Defauconpret, 1830.djvu/243

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Hélas ! pensait-il, combien Constance est changée depuis que des années de crime et de déguisement ont donné tant d’assurance à ce front jadis si timide, et à ces modestes regards ! La pudeur ne colore plus ses joues ; elle a perdu sa candeur virginale et toutes les graces de son sexe. Et c’est là mon ouvrage ! c’est à moi qu’elle a sacrifié son repos sur la terre et son bonheur dans l’autre vie.

— Plût au ciel ! dit-il encore en rembrunissant de plus en plus les couleurs du tableau qu’il avait devant les yeux, plût au ciel que ma main eût respecté cette rose sur sa tige ! ou, pourquoi l’objet qu’on aime perd-il si tôt les charmes qui avaient séduit nos cœurs ? La paisible solitude du cloître est devenue pour Constance une étroite prison, et son ame altière va se révolter contre ses fers et son étroite cellule. Que les lois monastiques vont lui paraître sévères, et sa pénitence cruelle !… Et c’est moi qui suis le coupable ! La voilà abandonnée aux veilles et à la discipline… peut-être même… ! Deux fois Marmion se leva, prêt à crier à ses gens de monter à cheval, deux fois le souvenir des ordres de son souverain arrêta ce transport, comme une humide vapeur éteint soudain une flamme naissante ; deux fois il chercha à se rassurer, en se répétant à lui-même : N’ai-je pas ordonné qu’on respectât sa vie en la gardant étroitement ! ils n’oseraient, pour toute leur île, arracher une seule boucle de ses cheveux.

XVIII.

Pendant que le repentir et l’amour renaissant déchiraient le cœur de Marmion, comme on voit deux ouragans ravager à la fois le lac Vennachar, l’hôte un peu bavard, qui avait entendu le pèlerin, et qui aimait à placer son mot, prit la parole en ces termes :

— Révérend pèlerin, les gens pieux qui, comme vous, visitent les pays lointains, apprennent souvent l’art de deviner l’avenir, par un mot, par un signe, ou par la connaissance des astres. Mais il y a près d’ici un lieu où