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même à nos aînés perfides,
Aux restes odieux de ses fils parricides,
Ce Dieu tant outragé doit pardonner un jour ?
Contre toute espérance, espérons leur retour.
Oui, le nom de Jacob réveillant sa tendresse,
Il se rappellera son antique promesse.
Il n’a point épuisé pour eux tout son trésor :
L’arbre longtemps séché, doit refleurir encor.
Ils sont prédits les jours, où par de pleurs sincères
L’enfant effacera l’opprobre de ses pères.
Tremblons à notre tour ; ils sont aussi prédits
Les jours où l’on verra tous nos cœurs refroidis.
Ce temps fatal approche. ô liens salutaires,
Vous captivez encor quelques âmes vulgaires :
Mais un sublime esprit vous brave hautement,
Et se vante aujourd’hui de penser librement.
Il doute, il en fait gloire, et sans inquiétude
Porte jusqu’au tombeau sa noble incertitude.
Tout était adoré dans le siècle païen :
Par un excès contraire on n’adore plus rien.
Il faut qu’en tous ses points l’oracle s’accomplisse :
Il faut que par degrés la foi tombe et périsse,
jusqu’au terrible jour tant de fois annoncé :
Ce jour dont l’univers fut toujours menacé :
Jour de miséricorde, ainsi que de vengeance.
Déjà je crois le voir, j’en frémis par avance.
Déjà j’entends des mers mugir les flots troublés :
Déjà je vois pâlir les astres ébranlés :
Le feu vengeur s’allume, et le son des trompettes
Va réveiller les morts dans leurs sombres retraites.