Page:Oeuvres complètes de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre, Tome 10, 1820.djvu/236

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entrer à l'ordinaire des domestiques qui venaient chercher des rôles de musique, ou qui lui en apportaient à copier : il les recevait debout et tête nue ; il disait aux uns : Il faut tant, et il recevait leur argent; aux autres : Dans quel temps faut-il rendre ce papier ? Ma maîtresse, répondait le domestique, voudrait bien l'avoir dans quinze jours. Oh ! cela n 'est pas possible, j'ai de l'ouvrage ; je ne peux le rendre que dans trois semaines. Tantôt il s'en chargeait, tantôt il le refusait, en mettant dans les détails de ce commerce toute l'honnêteté d'un ouvrier de bonne foi. En le voyant agir avec cette simplicité, je me rappelais la réputation de ce grand homme. Quand nous fûmes seuls, je ne pus m'empêcher de lui dire : Pourquoi ne tirez-vous pas un autre parti de vos talents ?

Oh ! reprit-il, il y a deux Rousseaux dans le monde : l'un riche, ou qui aurait pu l'être s'il l'avait voulu ; un homme capricieux, singulier, fantasque ; c'est celui du public : l'autre est obligé de travailler pour vivre, et c'est celui que vous voyez.

Mais vos ouvrages auraient dû vous mettre à l'aise ;