Page:Oeuvres complètes de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre, Tome 10, 1820.djvu/206

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Il apprit à connaître ses lettres dans des romans. Son père le faisait lire auprès de son établi. Vers l'âge de sept à huit ans, il lui tomba entre les mains un Plutarque, qui devint sa lecture favorite. Dès l'enfance il s'exprimait avec sensibilité. Son père qui lui trouvait beaucoup de ressemblance avec l'épouse qu'il regretait, lui disait quelquefois le matin en se levant : Allons, Jean-Jacques, parle-moi de ta mère. Si je vous en parle, disait-il, vous allez pleurer. Ce n'était point par singularité qu'il aimait à porter ce nom de Jean-Jacques, mais parce qu'il lui rappelait un âge heureux, et le souvenir d'un père dont il ne me parlait jamais qu'avec attendrissement. Il m'a raconté que son père etait d'un tempérament très-vigoureux, grand chasseur, aimant la bonne chère et à se réjouir. Dans ce temps-là on formait à Genève des coteries, dont chaque membre, suivant l'esprit de la réforme, prenait un surnom de l'ancien Testament. Celui de son père était David. Peut-être ce surnom contribua-t-il à le lier avec David Hume, car il aimait à attacher aux mêmes noms les mêmes idées,