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est pas venu au musée de Dordrecht, et que la petite reine de Hollande, qui sait ce que c’est que de souffrir, a reçu comme un grand-papa malheureux, voici que ce portrait me fait songer de nouveau, avec sa face placide et rusée, et son collier de barbe de bon semeur de tulipes, que ce sont des Hollandais, peuple de thésauriseurs, de spéculateurs, peuple de bons vivants aussi, qui ont produit ces ascètes et ces contempteurs de l’or, là-bas, au bout de cette Afrique qui regorge d’or et de diamants…

Mais, n’est-ce pas une race ou un peuple, à tout le moins une minorité disparate, réduite au seul négoce, et dont une même perpétuelle injustice cimente la solidarité – les juifs encore, pour tout dire – qui a enfanté un Karl Marx, spéculateur aussi, et des plus audacieux, acheteur – à quel découvert ? à terme de combien de siècles ? et contre la somme des capitaux coalisés – du bonheur que rêve le prolétariat universel ?



Au sortir du musée boër dont, à la grande joie du gardien, redevenu optimiste, j’emporte, plein mes poches, des souvenirs, en cartes postales coloriées : rondes des jolies filles de Marken, pêcheurs de Volendam, coiffés de leur bonnet de peau de mouton, moulins de Vormerveer (car, pour ce qui est des Boërs, des paysages transvaaliens, des batailles, des mines, de Krüger et de Dewet, il n’y en a point, étant invendables), je recommence à dévaler par la ville. Un moment, je m’arrête devant l’Ary Scheffer, en bronze, de la Scheffersplein, et il ne me paraît ni froid, ni ennuyeux. Autant qu’on peut retrouver, dans du métal coulé, l’