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rent d’en retirer de puits. Ce fut un travail pénible à cause de la dureté du sol ; mais ce qu’ils trouvaient était amer, non potable et, au surplus, en quantité très minime.

En marchant ainsi, ils arrivèrent aux approches du soir à Mar, localité qu’ils appelèrent de ce nom à cause de la mauvaise qualité de l’eau — en effet, l’amertume[1] se dit mar — ; et là, épuisés par cette marche ininterrompue et par le manque de nourriture – à ce moment ils n’en avaient plus du tout –, ils font halte. Un puits se trouvait là, c’était une raison de plus pour y demeurer ; sans doute, il ne pouvait à lui seul suffire à une si grande armée, cependant c’était un léger encouragement pour eux de l’avoir trouvé dans de tels parages ; car ils avaient ouï dire à ceux qui allaient aux informations qu’ils n’en rencontreraient plus aucun en poursuivant leur route. Mais cette eau-là était amère, et non seulement les hommes ne pouvaient la boire, mais les bêtes de somme même ne la supportaient pas.

2. Moïse, voyant leur découragement et l’inefficacité des paroles en une telle circonstance, — car ce n’était pas une armée véritable, capable d’opposer à la contrainte de la nécessité la force virile ; l’élan généreux de leurs sentiments était enrayé par la foule des enfants et des femmes, qui n’étaient pas de force à recevoir les enseignements de la raison –, Moïse donc était dans le plus grand embarras, parce qu’il faisait siennes les souffrances de tous. En effet, on n’avait recours à personne qu’à lui ; tous l’adjuraient, les femmes pour leurs enfants, les maris pour leurs femmes, de ne pas se désintéresser d’eux, mais de leur procurer quelque moyen de salut. Il se met alors à supplier Dieu de débarrasser l’eau du mauvais goût qu’elle avait et de la rendre potable. Et comme Dieu consentit à lui faire cette faveur, ayant saisi l’extrémité d’un bâton qui se trouvait sur le sol à ses pieds, il le fendit par le milieu[2], dans le sens de la longueur, puis, l’ayant jeté dans le puits, il persuada aux

  1. Josèphe traduit l’hébreu mar par πικρία, comme les LXX ; ceux-ci transcrivent l’hébreu Mâra par Μεῤῥά.
  2. La Bible ne dit rien de tel.