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pour propriété d’empêcher l’eau de passer à travers les mailles, — ils y déposent l’enfant et, la lançant sur le fleuve, confient à Dieu le soin de le préserver. Le fleuve reçoit l’objet et l’emporte ; Mariamme[1], sœur de l’enfant, sur l’ordre de sa mère, va longer l’autre rive du fleuve pour voir où il entraînerait la corbeille. Là, Dieu fit voir clairement que l’intelligence humaine ne peut rien, mais que tout ce qu’il entend accomplir finit par se réaliser heureusement et que ceux qui, en vue de leur propre sécurité, décrètent la mort d’autrui échouent malgré toute l’ardeur qu’ils déploient, tandis que ceux-là se sauvent d’une façon inattendue et, au milieu presque de leurs malheurs, rencontrent le succès, qui courent des dangers selon le dessein de Dieu. C’est ainsi que la destinée de cet enfant manifesta la puissance divine.

5. Le roi avait une fille, Thermouthis[2]. Jouant près des rives du fleuve et apercevant la corbeille que le courant emportait, elle dépêche des nageurs avec l’ordre de lui rapporter cette corbeille. Quand ceux-ci furent revenus, elle vit l’enfant et se prît pour lui d’une grande tendresse à cause de sa taille et de sa beauté. Telle était la sollicitude dont Dieu entoura Moïse que ceux-là même qui avaient décrété à cause de lui la perte de tous les enfants qui naîtraient de la race des Hébreux crurent devoir l’élever et prendre soin de lui. Thermouthis ordonne aussi qu’on fasse venir une femme pour allaiter l’enfant. Mais comme, loin de prendre le sein, il se détournait[3] et qu’il témoigna de même sa répugnance pour plusieurs autres femmes, Mariamme, qui était venue sur ces entrefaites sans dessein apparent et comme une simple curieuse : « C’est peine perdue, dit-elle, ô reine, que d’appeler pour nourrir cet enfant des

  1. Héb. : Miriam
  2. La Bible ne nomme pas la fille de Pharaon. Le Talmud (Meguilla, 13 a), l’appelle Bithia, se fondant sur le verset, I Chr., IV, 18 : « Et tels sont les fils de Bithia, fille de Pharaon ». Elle a encore d’autres noms ailleurs : Merris dans Artapanos (Eus., Praep. ev., IX, 27). Le Syncelle l’appelle a différentes reprises Pharié. Le nom de Thermouthis est certainement égyptien (voir sur ce nom G. Ebers, Durch Gosen zum Sinaï ; pp. 84, 539). C’est le nom d’une divinité égyptienne et aussi d’une localité de la Basse Égypte d’après Étienne de Byzance.
  3. Cf. Sota, 12 b ; Ex. Rabba, I. Pour expliquer le verset, Ex., II, 7, on dit aussi que Moïse ne voulait pas de nourrice égyptienne.