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celles-là extrêmement maigres et d’un aspect horrible ; elles dévorèrent les vaches grasses et grandes sans aucun profit[1], tant la faim les consumait, Après cette vision, je m’éveillai de mon sommeil, tout troublé, me demandant ce que j’avais vu là ; puis je m’endors de nouveau et j’ai un second rêve, bien plus étrange que le premier, et qui m’inspire encore plus de crainte et d’inquiétude. Je voyais sept épis issus d’une seule racine, la tête déjà lourde de grains, s’inclinant par suite de leur poids et de l’approche de la moisson, puis, auprès d’eux, sept autres épis misérables et tout secs, faute de rosée ; ceux-ci se mirent à dévorer et à engloutir les sept beaux épis, ce qui me frappa de terreur ».

6. Joseph répondit en ces termes : « Ce songe, ô roi, quoique vu sous deux formes, annonce un seul et même avenir. Ces vaches, animaux destinés à la charrue, dévorées par des vaches bien plus faibles, ces épis engloutis par de moindres épis prédisent à l’Égypte famine et disette succédant à une durée égale de prospérité ; ainsi la fertilité des premières années sera consumée par la stérilité des années qui suivront en nombre égal. Il sera difficile de remédier à la pénurie des vivres nécessaires. La preuve en est que les vaches maigres ont dévoré les vaches grasses sans avoir pu se rassasier. Cependant, ce n’est pas pour les affliger que Dieu fait voir l’avenir aux hommes ; c’est pour que, une fois avertis, ils emploient leur sagacité à atténuer les épreuves annoncées. Toi-même donc, en mettant en réserve les biens qui viendront dans la première période, tu adouciras pour les Égyptiens le fléau futur ».

7. Le roi admira le discernement et la sagesse de Joseph et, comme il lui demandait quelles mesures préventives il devait prendre pendant l’époque d’abondance en vue des temps qui la suivraient, afin de rendre plus supportable la période de stérilité, Joseph lui suggéra l’idée d’obliger les Égyptiens à ménager leurs biens et à s’abstenir de tout abus ; au lieu de dépenser en voluptueux leur superflu, ils devraient le réserver pour l’époque de disette. Il conseille également de prendre aux cultivateurs leur blé et de le

  1. Même observation que plus haut (§ 75, note).