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LES ROMANCIERS INTELLECTUELS

cynique, un désabusé ; mais en exprimant son sentiment intime sur les êtres et les choses, sur les milieux et les hommes qu’il fréquente, il ne sort pas de ses prérogatives de personnage de roman.

Ce Boureil fait peut-être de notre société canadienne un procès quelque peu sommaire ; mais on ne peut lui dénier la justesse d’une foule de ses observations ; il capte les travers d’un monde qui ne veut pas admettre qu’il ait des travers. Mais c’est surtout le désert de l’esprit qui le préoccupe, la manie que nous avons de consacrer le talent sur de simples apparences et aussi notre engouement pour les pseudo-valeurs littéraires, politiques ou autres, dont le seul mérite est d’être aimables et de savoir répéter avec brio et à propos les lieux communs qui traînent ici et là. Ce que l’on reproche surtout à Baillargeon, mais de façon inavouée, c’est sa grande franchise et son irrévérence de briseur des idoles que l’on s’est forgées.

Quant à Hertel, il ne s’agit pas de soutenir que sa trilogie — « Mondes chimériques », « Anatole Laplante, curieux homme » et « Le Journal d’Anatole Laplante » — constitue un exemple d’unité. Ce n’est certainement pas elle, on l’admettra sans discussion, qui vaudrait à Hertel le titre de romancier. Il donna jadis un roman au sens le plus ordinaire du mot : « Le Beau risque » ;