cette veine, le romancier a réussi un très beau tableau social de la fin de la première moitié du xxe siècle, témoin de l’accession des Canadiens français aux affaires. Mais cette accession n’est pas encore l’ascension vers les cimes : aucun d’eux n’approche ces géants qui ont illustré la fin du xixe siècle aux États-Unis et dont la persévérance et l’endurance dans la lutte ont réussi à édifier de véritables dynasties assises sur des fortunes que rien ne peut plus jeter par terre et dont la puissance économique, mise au service du pays, a fait de la République étoilée le pays le plus puissant du monde. Garneau n’a su ni garder sa fortune ni garder son fils : c’est une faillite, faillite qui est hélas l’image de ce qui se produit si souvent dans le monde canadien-français. Ringuet, en la matière, s’est montré profondément réaliste.
Le Canadien français préfère encore la politique aux affaires. Charlotte Savary nous le montre à l’aise dans cette ambiance trouble. « Isabelle de Fréneuse », cependant, va peut-être un peu loin. Cette politique, qui est le personnage central de son roman bien plus qu’Isabelle elle-même, elle ne lui a pas donné belle figure. Partant du principe qu’aucune différence idéologique majeure ne sépare nos partis, qui, tous deux, émargent aux mêmes sources de revenus, Mlle Savary flagelle