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énorme de facteurs. Ainsi, le paupérisme contribue certainement à abâtardir la race. Or, le paupérisme provient d’une infinité de causes économiques, politiques et parfois religieuses. Quand on réfléchit à ces faits, on voit nettement combien les comparaisons des darwiniens sont superficielles et enfantines. En admettant même que le progrès se soit accompli parce que les animaux les plus forts ont dévoré les plus faibles, on doit bien reconnaître que le progrès des hommes, vivant en société, ne s’est pas accompli par ce procédé. Dans les sociétés, les vainqueurs ne mangent pas les vaincus. Il peut même arriver qu’une société, ayant subi une défaite, fasse plus de progrès que la société qui a infligé la défaite. En un mot, il peut arriver des milliers et des milliers de circonstances qui ne se produisent pas dans la lutte, infiniment plus simple, entre animaux. Il est donc puéril d’identifier les luttes sociales aux luttes zoologiques.

La lutte est universelle dans la nature ; mais, comme je l’ai dit plus haut, elle change de procédés selon qu’elle passe d’un domaine de la phénoménalité à un autre. J’ai décrit ces procédés en détail dans des travaux auxquels je renvoie le lecteur[1].

Je ne veux pas recommencer cette description. Mais, pour mettre plus en évidence les erreurs des darwiniens, je veux en résumer ici les traits essentiels, en quelques brèves phrases.

La lutte astronomique s’opère par le procédé de l’attraction universelle. Les étoiles les plus puissantes attirent à elles la matière répandue dans les espaces célestes et grandissent vite ; les étoiles plus faibles attirent moins de matière et grandissent plus lentement ou ne grandissent pas du tout. Dans le domaine biologique, la lutte se livre par les procédés de l’absorption et de l’élimination. Les êtres les plus forts mangent les plus faibles. La

  1. Voir ma Justice et Expansion de la Vie. Paris, F. Alcan, 1905, au chapitre XXI, et aussi mes Luttes entre sociétés humaines. Paris, ibid, 1904.