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ment aux microbes de la tuberculose ? La plus sanglante bataille peut coûter la vie à trois cent mille hommes. En admettant qu’il y en ait une de ce genre tous les trente ans, cela fait dix mille hommes par an. La tuberculose, elle, doit emporter bien près de cinq millions d’individus par an, dans le seul groupe de civilisation européen.

Aussi les efforts faits pour lutter contre les microbes sont prodigieux. Il y a d’abord les efforts biologiques. On connaît l’admirable défense que notre organisme oppose aux infiniment petits par le moyen des phagocytes. M. Metchnikof a décrit récemment les péripéties de ce duel à mort. Elles sont aussi dramatiques que poignantes.

Mais les cellules de notre corps ne sont pas seules à mener la lutte contre les microbes pathogènes ; nous la reprenons ensuite et nous la continuons par l’ensemble de notre personne, par l’association de notre intelligence et de nos organes. Les péripéties de cette lutte sont l’énorme ensemble des moyens prophylactiques et thérapeutiques inventés par l’homme depuis l’antiquité, à commencer par les mesures de propreté les plus élémentaires[1] pour aboutir à la création des cliniques les plus perfectionnées. L’application de ces moyens prophylactiques et thérapeutiques a demandé une somme d’efforts prodigieuse. Et cette lutte contre les microbes pathogènes est de toutes les heures, de toutes les minutes. Mais il faut dire ici ce que j’ai dit plus haut de l’air. Précisément parce que la lutte est constante, elle échappe à la conscience individuelle et sociale.

Je dois faire une remarque importante. Le combat entre le microbe pathogène et l’homme est une lutte dans l’expression la plus littérale du terme. Il n’y a ici aucune espèce de métaphore. Deux êtres vivants sont en présence, qui sont en antagonisme complet : la mort du microbe donnera la vie à l’homme, la mort de l’homme donnera

  1. Se laver les mains avant de prendre un repas est une péripétie de la lutte contre les microbes.