Page:Novicow - La Critique du darwinisme social.pdf/29

Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’une incorruptible équité. Même dans le domaine de la biologie, le triomphe n’est pas toujours un criterium de supériorité.


Avant de terminer ce chapitre, je veux signaler une autre erreur capitale du darwinisme, venant de ce qu’il considère les phénomènes naturels à un point de vue trop étroit et trop unilatéral.

Pour le darwinisme, le pivot général de la vie, la cause principale de son évolution est la douleur. Il n’en est nullement ainsi. Quand on regarde seulement un côté des choses, on voit toujours faux. Il faut regarder les deux côtés. Le darwinisme considère seulement la douleur, il néglige complètement la jouissance. Cependant, c’est là un phénomène aussi répandu dans la nature que la souffrance. C’est la jouissance qui mène le monde et non la souffrance.

Assurément la jouissance peut être considérée comme une absence de souffrance. Mais ce point de vue n’est pas absolument juste. L’animal ressent spécialement et le fait négatif (absence de souffrance), et le fait positif (présence du plaisir). Mais ce dernier état est ressenti avec beaucoup plus de force, en sorte que l’impulsion positive, l’impulsion de la jouissance pousse à l’action avec plus d’énergie. C’est le désir de la jouissance qui est la cause de tout progrès. Quand un être vivant se trouve dans des conditions de milieu favorables et qu’il n’éprouve aucune souffrance, il semblerait que l’activité devrait cesser. Il n’en est nullement ainsi, cependant, parce que l’être vivant, poussé par la recherche du plaisir, tend constamment vers un champ d’activité nouvelle[1].

  1. Un ami de l’auteur avait un chien qu’il aimait beaucoup. Cette bête était soignée d’une façon admirable. Elle avait tout ce qui pouvait lui être agréable : nourriture, bon gîte, etc. On aurait pu croire qu’elle passerait sa vie à dormir. Nullement, elle allait souvent se promener et surtout se complaisait à le faire en voiture. On voyait que les nouveaux spectacles offerts à ses yeux lui faisaient plaisir et l’amusaient.