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dants. Il faut donc que l’accouplement se fasse entre deux girafes offrant le même caractère. Or, comment un caractère si peu apparent sera-t-il reconnu ? La sélection sexuelle, dit Darwin, a produit le magnifique plumage de certains oiseaux. Admettons-le. Mais la paonne voit les belles plumes du paon. Une girafe, mâle ou femelle, peut-elle être assez perspicace pour distinguer, dans l’autre sexe, une différence de cou de quelques centimètres ? Et, s’ils ne distinguent pas cette différence de longueur, comment deux animaux peuvent-ils se rechercher à cause d’elle ? Or, s’ils ne se recherchent pas à cause de cette différence, les accouplements entre girafes au cou long et girafes au cou court doivent être aussi fréquents que les accouplements entre girafes au cou long. Mais même si, par un hasard extraordinaire, toutes les girafes au cou long s’accouplaient entre elles[1], rien ne prouve qu’elles devaient nécessairement transmettre cette particularité à leurs descendants. L’expérience quotidienne montre que d’une femme de haute taille et d’un homme de haute taille peut naître un individu de taille moyenne et même de petite taille. L’hérédité est un phénomène des plus mystérieux. Nous ignorons absolument dans quel cadre elle est enfermée. Nous ne savons pas quels caractères secondaires se transmettent aux descendants et quels autres ne se transmettent pas. Les naturalistes sont même divisés sur la question de savoir si les caractères acquis sont héréditaires. Peut-on donc affirmer que cette variation de cou de quelques centimètres était précisément une particularité qui devait se transmettre aux descendants ? Or, si ce n’est pas le cas, toute la théorie croule par la base : le long cou de la girafe ne vient pas de l’accumulation de petites différences, transmises par hérédité et procurant des avantages dans la lutte pour l’existence ; donc, ce

  1. On comprend que l’union de deux individus humains de haute taille est un cas plus rare que l’union de deux individus de taille plus ou moins différente. Il en est de même pour les animaux.