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vérité. Le savant, digne de ce nom, ne se préoccupe ni de sentiment, ni de bienfaisance : il cherche à exposer les faits tels qu’ils sont. C’est à cela que se réduit sa tâche. Mais il faut bien le dire : vérité et bienfaisance sont des termes identiques. Si l’homme savait toute la vérité, il serait dieu. Alors il ne connaîtrait pas la souffrance. L’homme ne saura jamais toute la vérité, il ne sera jamais dieu ; mais, toujours, la somme de son bonheur sera en raison directe de la somme de vérité qu’il pourra connaître. Chercher la vérité et seulement la vérité, c’est réaliser l’humanitarisme par l’unique procédé qui soit rationnel, pratique et utile.

Cette idée peut être présentée à un autre point de vue. L’homme agit conformément à ce qui lui paraît être son intérêt. Or, si ce qui lui paraît son intérêt était toujours son intérêt réel, l’homme ne se tromperait jamais. Alors il atteindrait immédiatement le maximum de bonheur réalisable sur la terre. Maintenant, comme l’humanitarisme n’est autre chose que le désir de procurer la plus grande somme possible de félicité à l’ensemble de notre espèce, l’humanitarisme et l’exposition de la vérité se ramènent à des notions identiques.


Pour faire voir le peu de créance que le darwinisme mérite sur le terrain sociologique, je vais tâcher de prouver, par quelques courtes remarques, qu’il ne soutient pas toujours la critique sur son propre terrain, celui de la biologie.

Les espèces se transforment assurément, mais pas par les mécanismes qu’indique Darwin.

Considérons d’abord la théorie des variations lentes. On a essayé d’expliquer le cou de la girafe en disant qu’il provient de l’accumulation héréditaire de petits allongements. Les girafes ayant le cou le plus long ont trouvé plus facilement de la nourriture. Elles ont survécu ; elles ont laissé des descendants. Les girafes au cou plus court