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LA NATURE

avec Hyacinthe, descendit en des puits très profonds. Rosenblütchen n’avait pas manqué de maudire le vieux sorcier, car Hyacinthe semblait enchaîné à ses paroles et ne s’inquiétait plus de rien. Il ne se souvenait plus. Enfin l’étranger s’était éloigné, mais il avait laissé à Hyacinthe un petit livre que nul ne pouvait lire. Hyacinthe lui avait donné des fruits, du pain et du vin et l’avait accompagné bien loin sur la route. Il était revenu pensif et avait commencé une vie toute nouvelle. Rosenblütchen avait cruellement souffert, car, de ce moment, il ne s’en inquiéta presque plus et demeura toujours renfermé en lui-même. Un jour, il revint à la maison ; et l’on eût dit qu’il venait de renaître. Il tomba dans les bras de ses parents et pleura. Il faut que je m’en aille, leur dit-il ; la vieille femme merveilleuse de la forêt m’a appris de quelle façon je recouvrerai la santé ; elle a jeté le livre dans les flammes, et m’a donné l’ordre d’aller à vous et de demander votre bénédiction. Peut-être reviendrai-je bientôt ; peut-être ne reviendrai-je jamais. Saluez Rosenblütchen. J’eusse voulu lui parler ; je ne sais ce que j’ai ; quelque chose me pousse. Lorsque je veux songer aux anciens jours, des pensées plus puissantes s’interposent ; la paix s’en est allée, et le cœur et l’amour en même temps. Il faut que j’aille à leur recherche. Je voudrais vous dire où je vais, mais moi-même je l’ignore. Je vais où séjourne la Mère des Choses, la vierge voilée. C’est pour elle que mon âme s’enflamme. Adieu. Il s’arracha à leurs étreintes et s’en alla. Ses parents se lamentèrent