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je vous avais donné…


Un visage est sacré quand il s’épuise et meurt
Comme un sol que l’été dévaste,
Sur qui les lourds pigeons et les ombres des fleurs
Font des taches sombres et vastes.

Un destin est sacré quand il a contre lui
Toute une foule qui s’élance,
Et que, sous cet affront, il s’enivre, et qu’il luit
Comme l’olivier et la lance !

Un destin est sacré quand il est ce soldat
Qu’un guerrier somme de se rendre,
Et qui, pressant toujours son fer entre ses bras,
S’écrie en riant : « Viens le prendre ! »

— Je ne rendrai qu’à vous les armes de mon cœur.
Mes dieux qui sont en Crète et dans l’île d’Égine,
Permettent que l’extrême et fidèle langueur
À cet excès de grâce et de douceur s’incline,
Mais nul autre que vous, sur les plus durs chemins,
Ne me verra pliant sous l’angoisse divine,
Laissant tomber mon front, laissant pendre mes mains,
Emmêlant mes genoux, telle qu’on imagine
Cléopâtre enchaînée au triomphe romain…