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l’air brûle, la chaude magie…


Ce ciel, ces poivriers, ces palmes,
Ces balcons d’un rose de fard,
Comme un vaisseau dans un port calme,
Rêvent aux transports du départ.

Ah ! comme un jour brûlant est vide !
Que faudrait-il de volupté
Pour combler l’abîme torride
De ce continuel été !

Des œillets, lourds comme des pommes,
Épanchent leur puissante odeur ;
L’air, autour de mon demi-somme,
Tisse un blanc cocon de chaleur…

Dans la chambre en faïence rouge
Où je meurs sous un éventail,
J’entends le bruit, qui heurte et bouge,
Des chèvres rompant le portail.

— Ainsi, c’est aujourd’hui dimanche,
Mais, dans cet exil haletant,
Au cœur de la cité trop blanche,
On ne sent plus passer le temps ;