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OFFRANDE DU BATELIER


Je fus vaillant, mon sang hardi coulait sur moi
Dans les combats des mers. Un soir, humble et timide,
J’ai vu, dans Syracuse, Eschyle et Simonide,
Puis j’ai repris ma tâche à l’ombre de nos bois.

Aujourd’hui, j’ai senti, quand a brillé l’automne,
Qu’un cœur empli d’amour s’inquiète et s’étonne
De respirer l’azur, auquel il ne rend point
La force et le plaisir qui brûlaient dans mes poings
Lorsque ma vie était à son zéniht ! Aussi
Je vais bientôt mourir. Ce n’est pas le souci
Qui me conduit vers toi, Déesse. Je t’apporte
Le lierre obscur et dru qui surmontait ma porte
Où je vais repasser, tantôt, tranquille et fort.
— Je t’offre ce rameau, douce Aphroditè d’or,
Pour n’avoir pas été, même au soir de mon âge,
Sans désir ni courage !