Page:Noailles - Les Forces éternelles, 1920.djvu/233

Cette page a été validée par deux contributeurs.
225
LE PRINTEMPS ÉTERNEL


Quel est donc ce complot qui se prépare, et doit
Triompher promptement, tant l’allégresse est sûre,
Et quel est ce dieu vif, affairé, dont les doigts
Font dans la sombre écorce une tiède cassure ?

Sur le bord d’un chemin un chevreuil fait le guet :
Son visage de grand papillon brun surveille
La préparation du printemps. Ses oreilles
Ont l’ample enroulement des feuilles du muguet.

Quelle est cette subite, invisible présence
Par quoi tout l’univers est de bonheur atteint,
Qui fait gonfler le sol, qui promet l’espérance,
Par qui le ciel rêveur est enfin moins lointain ?

Oui, ce ciel délicat, qui songe et semble grave,
Tant il doit commander un ordre universel,
Semble dire à chacun : « Je m’approche, sois brave,
« Écoute mon auguste et dangereux appel.

« Oui je descends sur toi, sur les bêtes, les plantes,
« J’exige ton accueil, je m’empare de vous,
« Ô monde ! Le chaos, comme une eau molle et lente
« Se retirait devant mes bondissants genoux !