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choses, que ses décisions étaient seules acceptées ; mais passons, nous y reviendrons plus tard.

Raison de plus : si madame de Sauvetat n’avait même pas l’ombre d’une contrariété chez elle, pourquoi la supposer, sans motif et sans force morale, capable d’une action qui a demandé une persistance et une énergie peu communes ? Enfin, le testament n’est-il pas le dernier argument et le plus sérieux contre votre protégée ?

— Le testament ? Vous l’avez donc vu ?

— Oui, il a été déposé avant-hier au greffe, où je l’ai lu tout entier. M. de Sauvetat donne directement toute sa fortune à sa fille, sans la moindre jouissance à sa femme, du reste assez riche par elle-même pour s’en passer. Il lègue à Marianne 50,000 francs en toute propriété, et finit en demandant que Marguerite soit mariée le plus tôt possible. Dans le cas où le mariage serait retardé, il nomme pour tuteur légal Jacques Descat son cousin.

— Vous a-t-on dit si madame de Sauvetat ne protestait pas contre cette dernière clause ?

— Madame de Sauvetat est un ange. Toute sa vie, elle s’est inclinée devant les volontés de son maître. Ce n’est pas aujourd’hui qu’elle peut songer à protester, abîmée qu’elle est de regrets et de désespoir.

Et puis, pensez-vous aux difficultés que lui créerait l’administration d’une fortune comme celle de son mari ?

— Tout cela est bien étrange, murmura le juge.

— Moi, je le trouve on ne peut plus clair et facile à expliquer, répliqua l’autre.

M. de Sauvetat, ennuyé probablement des instances de Marianne, tombe malade. La paix se fait alors entre les deux amants.