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ser écraser par la lourde responsabilité qui pesait sur leur conscience.

Les portes noires du cimetière s’ouvrirent devant eux.

Le petit jardin si embaumé et si fleuri au printemps offrait à cette heure le spectacle navrant de la désolation et de la tristesse.

Le ciel bas et noir était encore obscurci par l’écume flottante des nuages que le vent d’hiver chassait du côté des montagnes, comme un troupeau de sinistres fantômes.

Les longs cyprès verts tordaient en gémissant leurs cimes aiguës couvertes de givre ; sur les tombes dénudées, les feuilles mortes, jaunies et mouillées, cachaient les inscriptions, et augmentaient le désordre de ce paysage en deuil.

Les magistrats et les experts s’approchèrent d’un monument plus grand et plus vaste que les autres, autour duquel le commissaire de police avait réuni quelques maçons mandés à la hâte.

Les pierres descellées, un long cercueil, à peu près neuf et tout à fait intact, fut mis à découvert.

Lorsque les constatations légales furent accomplies, les manœuvres le transportèrent sous un auvent étroit et humide, et se retirèrent afin de laisser toute liberté aux hommes de l’art.

Ceux-ci eurent vite enlevé le couvercle, sur lequel étaient dessinés en larges clous d’argent un L et un S enlacés.

Aussitôt apparut la tête d’un homme de quarante-cinq ans environ.

Comme l’avait dit la vieille garde-malade, ce visage aux traits irréguliers, mais calmes, portait à peine les traces des luttes suprêmes de l’agonie et des affres