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Inutile de raconter ici ce que Marianne vit et entendit cette nuit-là ; elle ne s’en souvint pas elle-même.

Ce qui resta dans sa mémoire, c’est que Blanche était une créature aussi perfide que vicieuse, c’est que c’était une de ces femmes fatales à tous, non-seulement incapables de résister aux avances sérieuses d’un homme, mais dangereuses au premier chef, par le soin qu’elles mettent à dissimuler leurs intrigues et l’habileté infernale avec laquelle elles recouvrent leur vie d’un voile de pureté et de dignité.

En effet, qui aurait jamais dit, qui aurait jamais voulu croire que cette madame de Sauvetat, que tous jugeaient chaste et honnête était une femme perdue, qui souillait si effrontément le nom qu’on lui avait confié.

Il y avait longtemps que durait cette intrigue, qui n’était peut-être pas la première, et qui à coup sûr, ne serait pas la dernière, car la jeune femme avait plutôt l’air de subir cet amour grossier que de le solliciter ; elle semblait fatiguée et blasée.

Le jour arrive vite au mois de mai ; Blanche accompagna elle-même son amant, et délivra ainsi Marianne de son intolérable supplice. Cette dernière remonta dans sa chambre, brisée, anéantie, folle de douleur. Que faire ? que devenir ? À qui demander conseil ? qui appeler à son aide ?

Qui ? Personne.

Est-ce que son terrible secret lui appartenait ?

Et son frère ! ce frère bien-aimé qui l’avait si généreusement adoptée, ce frère si jaloux de son honneur et de la pureté de son nom, que deviendrait-il lorsqu’il connaîtrait ce mystère d’infamie et de honte ?…

Car il le connaîtrait. Le contraire était impossible. Marianne ne le lui apprendrait pas, certes non ;