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— À mort ! à mort ! crièrent en entrant les soldats affolés.

Un instant, la jeune femme hésita : elle pouvait nommer son mari, dire qu’elle était Française ; mais ce qui restait de la tribu était là, sa famille, ses amis, tous ceux dont les pères et les frères s’étaient fait tuer dans la gorge pour sauver la liberté !

À ce moment, invoquer un nom qui ne pouvait être une sauvegarde que pour elle seule, devenait une lâcheté : elle le sentit. Aussi, faisant appel à tout son courage, elle se tut, et, ne reculant pas, elle attendit vaillamment la mort.

Déjà les baïonnettes menaçaient les têtes et les poitrines.

Un soldat, prononçant quelques mots d’arabe, s’approcha.

— Tu peux te sauver, dit-il.

M. de Sauvetat se faisait accompagner quelquefois dans ses visites, jusqu’à l’entrée des gorges, par des hommes dévoués : elle se crut reconnue.

— Seule ? demanda-t-elle hautaine et résolue, jamais !

— Oh ! qu’à cela ne tienne : avec qui tu voudras.

— Avec la tribu entière.

— Eh bien ! donne tout ce que tu possèdes d’or et de bijoux et tu pourras tout emmener avec toi.

— Volontiers.

Et Chériffa ouvrit un grand coffre placé derrière elle, et laissa voir deux cassettes.

— Prenez, dit-elle.

En même temps, elle tendit aux maraudeurs, dont les yeux brillèrent, le coffret où étaient enfermées ses richesses à elle.

Mais les soldats voulaient les deux.