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a permis de me toucher ? Ah ! ne me laisserez-vous donc point mourir en paix ? Et n’y a-t-il pas moyen d’être débarrassée de vous ?

Après cette apostrophe, M. Larroche, navré, quitta la chambre de la jeune fille.

Son état empirait d’heure en heure.

Jacques était la seule personne dont elle supportât la présence.

M. de Boutin était toujours absent de Roqueberre, il s’était fait remplacer au tribunal pour quelque temps ; nul ne savait où il était allé.

Le mois de décembre fut peut-être encore plus beau, cette année-là, que les deux ou trois mois précédents.

Le froid n’arrivait pas ; seules les feuilles jaunies se détachaient une à une ; l’air était tiède et doux.

La Beyre sautait toujours par dessus la passerelle du moulin, avec son bruit charmant et mélancolique ; le soleil, qui s’éteignait dans des nuages de pourpre, illuminait de ses rayons mourants les coteaux à peine dépouillés ; c’était encore l’automne, l’automne sans pareil du Midi, avec ses prés verts, ses fleurs aux parfums pénétrants, ses roses toujours belles.

Ce jour-là, Marguerite voulut descendre sur la terrasse ; d’après ses ordres, Bertrand roula son fauteuil auprès du banc de pierre.

Depuis quelque temps, la jeune fille avait repris ses habits de deuil, qu’elle avait un instant quittés.

Au milieu de ses rubans de crêpe, et de sa longue robe noire, sa pâleur ressortait plus effrayante.

Jacques arriva, venant faire sa visite quotidienne.

— Comment vas-tu, ma fille ? demanda-t-il en l’embrassant.

— Merci, pas plus mal. Tu m’as dit que si je t’aimais, j’accepterais les avis d’un médecin étranger ; fais venir