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Le premier s’inclina en souriant, et feignit de ne pas voir la main que M. Larroche lui tendait.

M. de Boutin, au contraire, ouvrit les siennes toutes grandes, et secoua celle de Georges à plusieurs reprises.

Sa physionomie austère s’éclaircit subitement, et ce fut avec un accent de bonhomie que rien ne saurait dépeindre, qu’il s’écria :

— Eh bien, mille millions de tonnerres ! vous avez du courage, vous, de devenir le mari de Madame !…

En disant ces mots, il jeta un regard oblique vers Blanche.

La jeune femme, ahurie par ces quelques paroles, en proie à une épouvante impossible à dissimuler, n’avait plus la force de demander au juge ce qu’il voulait dire.

Jacques, immobile, l’éclair dans les yeux, attendait, tout prêt à se mêler à la lutte.

La naïve bêtise de Georges vint délivrer Blanche de sa suprême angoisse.

— Pourquoi donc me faut-il du courage ? demanda-t-il ; je ne comprends pas.

Sa figure avait en effet l’expression idiote des gens qui entendent, mais ne saisissent pas malgré leurs efforts.

Le juge regarda un instant M. Larroche et sa femme, les rapprochant pour ainsi dire, les analysant tous deux, cherchant à lire ce qui pouvait exister de complicité ou de duperie en eux ; puis, de sa voix redevenue subitement grave et sévère :

— Pourquoi ? dit-il. Parce que M. de Sauvetat avait une nature exceptionnellement noble et élevée, que comme intelligence et caractère il était supérieurement trempé, et que, pour le remplacer ici, vous aurez beaucoup à faire, Monsieur.

Marguerite étouffa un sanglot. Georges essaya de