Page:Ninous - L Empoisonneuse.pdf/29

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— D’ailleurs, continua-t-elle, y aurait-il une preuve quelconque, pourquoi me tourmenter ? Malgré toi, malgré la terre entière, c’est ma volonté qui se fera !

Elle se disposa à regagner sa chambre, rassurée et résolue.

Comme elle allait arriver à la porte, elle avisa un placard presque invisible à la tête du lit.

Elle l’ouvrit, il était plein de livres.

Sur la tablette de devant on voyait une seule enveloppe scellée de cinq cachets de cire rouge.

Elle s’en empara.

— Ceci est mon testament, lut-elle à demi-voix.

Un sourire de dédain releva le coin de ses lèvres fines.

— Oui, murmura-t-elle, tu as bien pris tes précautions, un legs la perdra plus sûrement encore. Ah ! Jacques ! Ah ! Marianne, vous vous aimez ! vous deviez avoir ma fille… Non, ce n’est pas encore fait ! Je suis là ! Ne m’oubliez pas.

Mais, soudain, toute sa force s’évanouit, tout son courage partit comme une fumée que le vent emporte, son cœur s’arrêta de battre, elle se sentit prise d’une indicible terreur.

On avait remué derrière elle !

Qu’était-ce ?

La silhouette de Cadette lui apparaissait toujours immobile sur sa chaise de paille, les portes closes n’avaient pas bougé dans leurs gonds le mort : s’était-il relevé de sa couche funèbre ?

Une main s’appuya sur son épaule.

Par un effort de volonté sous lequel elle se raidit tout entière, elle parvint à tourner la tête.

Marianne, pâle, calme, terrible, était là.

Madame de Sauvetat étouffa un cri de suprême angoisse.