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M. de Boutin, qui était dans une pièce voisine, entra par autre porte.

— Cette fille-là, dit-il au directeur, est le remords de mes jours et de mes nuits. Jamais, jamais je ne réparerai l’erreur que la justice a commise envers elle !…

— Ou que Marianne elle-même lui a fait commettre ! répondit spontanément l’autre.

M. de Boutin étonné regarda le directeur, et après une minute d’hésitation, il lui tendit la main, que le geôlier serra vivement sans parler.

Les deux hommes s’étaient compris.

Le soir, Marianne ne resta pas au milieu des autres détenues. L’air était tiède après une journée accablante de chaleur. La clarté décroissante du jour baignait de flots de pourpre un petit coin du préau où elle allait s’asseoir.

On respectait ses heures de solitude, lorsqu’elle se dirigeait de ce côté.

Madame Marie-Aimée la suivit. Un grand rideau de chèvrefeuilles et de vignes vierges cachait ce bout d’allée à tous les regards.

Elle la vit tomber sur un petit tertre gazonné et cacher sa tête dans ses mains.

La jeune religieuse vint s’asseoir à ses côtés, tout doucement, elle enlaça sa taille :

— Ma sœur chérie, murmura-t-elle.

Marianne devina la présence de son amie, elle s’abandonna, et renversa sa belle tête sur l’épaule d’Aimée :

— Ah ! s’écria-t-elle au milieu de rauques sanglots, l’absence !… l’oubli !… quelle torture.

L’autre la regarda un instant avec une profonde émotion.

— Va, crois-moi, que l’absence ne t’effraie pas, tu