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Comme il y avait déjà bien des années, on l’introduisit dans le petit salon d’études où une autre aussi l’avait appelé.

Marguerite assise sur le canapé où il avait vu Marianne autrefois ; comme elle, souple et grande, ses longues mains effilées croisées sur ses genoux, dans l’attitude favorite de celle qu’il avait perdue, attendait le jeune homme.

Du seuil de la porte, celui-ci l’enveloppa d’un regard, et vit tous ces détails, il tressaillit, et se sentant chanceler sous l’empire de ses souvenirs, il s’arrêta :

— Approche, Jacques, murmura l’enfant de cette voix douce et ferme, qui lui rappelait tant de choses, approche, j’ai besoin aujourd’hui de toute ton affection.

Il obéit.

— Comme tu lui ressembles ! dit-il.

Il déposa un baiser sur le front de sa pupille et essuya les larmes qui coulaient de ses yeux.

Elle rougit.

— C’est le meilleur compliment que tu puisses me faire, mon ami, répondit-elle en souriant.

— Tu ne l’as donc pas oubliée ?

— Oh ! non ! je vais tous les jours dans sa petite chambre dont j’ai les clefs ; là, je retrouve comme un parfum d’elle, je la revois à mes côtés, aimante, dévouée, telle que je l’ai connue ; par la pensée, je me jette dans ses bras, et si jamais, ajouta l’enfant en portant subitement la main sur son cœur, il me fallait faire quelque grand sacrifice, son souvenir seul m’en donnerait la force.

Jacques pressa longuement la fillette dans ses bras.

— Tu as son cœur, comme tu as sa grâce et sa beauté ; merci pour cette affection que tu lui conserves. Mais si le jour de l’épreuve arrivait pour toi, chère enfant