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La porte ne s’était pas refermée que le malade s’agita sur son lit.

— Marianne ! murmura-t-il d’une voix faible mais distincte.

La jeune fille se précipita vers lui.

— Renvoie Cadette, ordonna-t-il, je veux demeurer seul avec Blanche et toi.

Ces mots avaient été prononcés très bas ; madame de Sauvetat pourtant les entendit.

— Ah ! balbutia-t-elle, il avait sa connaissance, je suis perdue !

Marianne fit descendre Cadette en lui recommandant expressément de ne laisser monter personne.

M. de Sauvetat s’était péniblement soulevé sur ses oreillers. Son front qu’avait déjà effleuré l’aile de la mort était livide, mais ses yeux brillaient pleins de colère et de volonté.

— Blanche ! dit-il, d’une voix dure, approchez !

— Madame de Sauvetat se dressa inconsciente et raide comme un automate, elle fit quelques pas au hasard, folle de peur, avançant malgré elle vers ce spectre terrible dont elle ne pouvait détacher ses yeux.

Le moribond la fixa un instant sans prononcer une parole. Enfin ses lèvres blêmes, laissèrent tomber ce seul mot :

— Misérable !

Rien de plus, mais quel accent de mépris et d’horreur.

Elle se précipita à genoux suppliante, terrifiée. Marianne se jeta entre eux.

— Lucien, s’écria-t-elle, Lucien ! grâce, pardonne…

— Jamais ! dit-il.

— Jamais ?… reprit-elle, et ta fille, Marguerite, que va-t-elle devenir ?…