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complet : ainsi, à Roqueberre, lorsque vous avez appris cette dernière circonstance si aggravante pour vous, vous n’avez pu vous empêcher de dire « Ah ! j’avais laissé les clefs à ce placard, j’aurais dû m’en douter. » MM. les jurés apprécieront, et vos paroles là-bas, et votre silence ici.

— Où vous étiez-vous procuré cet acétate de plomb, et sous quel prétexte en aviez-vous acheté ?

Un mystérieux sourire erra sur les lèvres de Marianne.

— C’est là, messieurs les jurés, continua le président, une des nombreuses questions devant lesquelles l’accusée demeure opiniâtrement muette. Il est évident que le poison a dû être acheté à une époque assez reculée pour que l’instruction n’ait pu en recouvrer les traces chez aucun pharmacien de la localité. Dans ce cas, ce serait une preuve de plus d’une longue préméditation.

Il se retourna vers Marianne.

— Connaissiez-vous le testament de M. de Sauvetat et le legs qui vous enrichissait ?

— Oui. M. de Sauvetat m’avait fait part de ses intentions dernières et de sa générosité envers moi.

— L’aviez-vous provoquée ?

Une expression de hauteur dédaigneuse contracta les traits de la jeune fille ; mais, se calmant aussitôt, elle reprit son masque d’impassibilité.

— Vous êtes confondue, reprit le magistrat. En effet, M. de Sauvetat tombe malade le 12, le 18 il fait son testament, et le 30 il succombe à une maladie foudroyante, en vous laissant relativement riche, vous, l’orpheline abandonnée à laquelle on ne connaît pas de ressources. Pourriez-vous nous expliquer comment M. de Sauvetat vous a laissé cette somme assez