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cats, voire même le greffier, étaient choyés, caressés, invités partout.

Dire les nombreuses œillades décochées à cette occasion serait chose impossible.

— Vous me placerez pour la fameuse affaire, n’est-ce pas, cher monsieur ? soupiraient tout bas des petites voix flûtées, auxquelles un accent gascon des plus prononcés n’enlevait ni le charme ni la douceur. Vous savez que je compte sur vous ; cela doit vous être facile ; il me faut si peu de place !

Aussi fallait-il voir tous ces beaux messieurs, quelques minutes avant l’audience, pétillant sous leur toge gaillardement mise de côté, le rabat fraîchement empesé, les favoris taillés au cordeau, roides dans leurs robes noires, allant chercher à la porte de la salle leurs belles protégées et leur faisant galamment trouver une place jusque sur l’estrade de la cour.

M. Drieux était au premier rang, derrière le procureur général ; un sourire à peine comprimé errait sur ses lèvres minces ; ses yeux, encore plus clairs qu’à l’ordinaire ; disaient suffisamment :

— Admirez, c’est mon œuvre !

Dans le public, de longs murmures indistincts, mais continus, s’élevaient comme le bruit des flots avant la tempête.

De temps en temps on entendait une invective contre l’accusée ; une seule voix la formulait.

C’était alors qu’au fond du prétoire le grondement ; de la foule s’accentuait et devenait du même coup protestation et menace.

C’est que l’on voyait Jacques assis au banc de la défense : Jacques, l’enfant du pays, le fils d’un homme qui avait fait un bien immense à la contrée, et que la ville d’Auch n’oubliera jamais ; Jacques, par lui-même