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votre seul protecteur, que vous allez sortir d’ici pour venir au grand jour et devant tous prendre dans ma maison la place de ma mère morte, place qui depuis si longtemps devrait être la vôtre !

— Alors, Jacques… vous ne croyez pas à ma culpabilité… vous ?

— Toi, coupable, toi, ma bien-aimée, toi ma sœur, mon amie, ma femme !… Oh ! qui a dit cela ? Qui osera le répéter devant moi, qui m’empêchera de prouver au monde entier ta pureté immaculée ?

Quelque chose de plus fort que sa volonté, la poussa dans les bras que Jacques tendait vers elle.

Comme un pauvre oiseau blessé, elle cacha sa tête dans la poitrine du jeune homme.

— Ah ! s’écria-t-elle, que c’est bon d’être aimée ainsi ! Je puis mourir, maintenant ; que m’importe !

Mais lui, couvrant de baisers ses splendides cheveux, pressant sur son cœur ce beau corps souple et tiède qui se brisait comme celui de la gazelle atteinte d’un plomb mortel.

— Que parles-tu de mourir, ma bien-aimée ? lui dit-il ; que vois-tu encore de sombre ou de noir autour de toi, lorsque je suis venu pour te sauver et que je suis là ?

Elle se raidit.

Il continua :

Est-ce que tu ne veux plus revoir ceux qui t’ont soupçonnée ? Veux-tu fuir le pays où tu as été calomniée, où tu as souffert ? Nous partirons ensemble, nous irons loin, bien loin ; s’il le faut, aux confins du monde, n’importe où, pourvu que je puisse te voir soir et matin, te faire vivre, veiller sur toi, te couvrir de mon nom, t’envelopper de mon amour ; pour toute récompense, entendre ta voix adorée me dire : « Merci ! » sentir la pression de cette main loyale m’encourager au bien ou au devoir !…