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même ; ce n’est pas moi, mais ce sera celui que j’attends.

Enfin, les experts déposèrent leur rapport au parquet. Comme les magistrats s’y attendaient, ce rapport déclarait que M. de Sauvetat était mort empoisonné.

Le plomb avait été administré en quantités telles que la circulation l’avait apporté jusque dans les extrémités les plus reculées du corps et en avait saturé chaque organe.

Cette fois, le triomphe de M. Drieux était complet.

— Eh bien ! dit-il à M. de Boutin, vous n’avez même pas la dernière ressource de croire que le crime a été le résultat d’un accident ou d’une méprise ?

Vous avez entendu M. Gaste, le rapport est sous vos yeux ; vous savez à quoi vous en tenir sur les doses administrées ; pensez-vous que pour mener à bien une si horrible tâche, il n’a pas fallu veiller la nuit et le jour, le matin et le soir, sourire en versant la mort, avoir enfin un but qui vous rende impitoyable ?

Il riait et montrait malgré lui ses dents aiguës.

Le juge était pâle comme sa cravate de batiste.

— Je m’attendais à ce résultat, dit-il ; mais tout n’est peut-être pas perdu encore ; qui vous assure qu’elle ne voudra pas parler ?

— Qui m’assure ?… répondit le procureur avec son sourire fin ; c’est que vouloir n’est pas toujours pouvoir.

Et au plus profond de soi-même il ajouta :

— À présent, malgré vous, M. de Boutin, l’affaire est sûre, et… mon mariage aussi.