XII
L’ENQUÊTE
Le lendemain, tout Roqueberre était sur pied ; personne ne travaillait.
Dans les rues on ne voyait que des gens groupés, discutant, s’exaltant, criant à qui mieux mieux, donnant le plus bel échantillon possible de cette expansion méridionale que rien ne calme ou ne contient.
— Vous savez la nouvelle ?
— Malheur ! ne m’en parlez pas, c’est horrible !
— Quoi donc ?
— M. de Sauvetat est mort empoisonné.
— Ah ! misère ! est-ce vrai ?
— Oh ! moi, j’ai toujours dit que cette maladie n’était pas naturelle !…
— Et qui a fait le coup, le sait-on ?
— Parbleu ! mademoiselle Marianne, sa maîtresse !
— Pas possible ; pourquoi l’aurait-elle empoisonné ? Elle n’avait rien à gagner à sa mort, au contraire.
— Vous ne savez donc pas ? il lui laissait cinquante mille francs par testament.
— Et avec cela, elle allait se marier avec M. Descat, qui, lui, paraît-il, ne voulait plus attendre.
— Ah ! vous m’en direz tant ! Mais la noce n’est pas encore prête à se faire, je suppose !
— Pas probable ; elle est sous les verrous !
— Ah bah ! Soyez donc tranquille, elle trouvera encore moyen d’en sortir ; est-ce qu’on condamne jamais les riches ?
Au Cercle littéraire et artistique l’émotion était tout aussi grande.