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L’ANTÉCHRIST


explique pourquoi, en général, une telle sorte d’hommes existe. Mais cela fait qu’elle est le contraire, l’antagoniste, de la véracité, — de la vérité… Le croyant n’a pas la liberté d’avoir une conscience pour la question du « vrai » et du « faux » : ici la probité serait sa perte. La dépendance pathologique de son optique fait du fanatique un convaincu — Savonarole, Luther, Rousseau, Robespierre, Saint-Simon — le type contraire des esprits forts et libérés. Mais la grande attitude de ces esprits malades, de ces épileptiques des idées, agit sur les masses, — les fanatiques sont pittoresques, l’humanité préfère voir des attitudes que d’entendres des raisons

55.

— Un pas de plus dans la psychologie de la conviction, de la « foi ». Il y a longtemps déjà que j’ai fait remarquer que les convictions sont peut-être des ennemis plus dangereux pour la vérité que les mensonges (Humain, trop humain, Aph. 483). Ici je voudrais poser la question définitive : Existe-t-il, d’une façon générale, une antithèse entre le mensonge et la conviction ? — Tout le monde le croit, mais qu’est-ce que tout le monde ne croit pas ? — Toute conviction a son histoire, ses formes primitives, ses tentatives et ses méprises : elle devient conviction, après ne l’avoir point été pendant longtemps et sans qu’elle puisse le rester. Comment ! sous cette forme embryonnaire de la conviction, ne pourrait-il y avoir un mensonge ? — Quelquefois il n’est besoin que d’un