nayeur, rien que ce qui pouvait lui être utile. Plus de réalité, plus de vérité historique !… Et, encore
une fois, l’instinct sacerdotal du Juif commit le
même grand crime contre l’histoire, — il effaça
simplement l’hier et l’avant-hier du christianisme, il
s’inventa une histoire du premier christianisme.
Plus encore : saint Paul faussa à nouveau l’histoire
d’Israël, pour la faire apparaître comme la préface
de ses actes : tous les prophètes ont parlé de son
« Sauveur »… L’Église faussa plus tard jusqu’à
l’histoire de l’humanité pour en faire le prélude du
christianisme… Le type du Sauveur, la doctrine, la
pratique, la mort, le sens de la mort, même l’après
la mort — rien ne resta intact, rien ne garda plus
de sa ressemblance avec la réalité. Saint Paul
déplaça tout simplement le centre de gravité de toute
l’existence, derrière cette existence, — dans le
mensonge de Jésus « ressuscité ». Au fond il ne
pouvait pas se servir du tout de la vie du Sauveur,
— il avait besoin de la mort sur la croix et encore
de quelque chose d’autre… Croire à la sincérité d’un
saint Paul qui avait sa patrie au siège principal du
rationalisme stoïcien, quand, avec une hallucination,
il s’apprêtait une preuve de la survivance du Sauveur,
ou même croire au récit que ce fut lui qui eut cette
hallucination, serait une véritable niaiserie de la part
d’un psychologue : saint Paul voulut le but, donc il
voulait aussi les moyens… Ce qu’il ne croyait pas
lui-même, les niais chez qui il jeta sa doctrine, le
crurent. — Son besoin était la puissance ; avec saint
Paul le prêtre voulut encore une fois le pouvoir, —
il ne pouvait se servir que d’idées, d’enseignements,
Page:Nietzsche - Le Crépuscule des Idoles - Le Cas Wagner - Nietzsche contre Wagner - L'Antéchrist (1908, Mercure de France).djvu/302
(Redirigé depuis Page:Nietzsche - Le Crépuscule des idoles.djvu/302)
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
302
L’ANTÉCHRIST