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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

de récompenses moindres, bien que ce soit justement à cause de ceux-ci que la plupart des hommes ont juré fidélité aux lois de cette république, et en général à la science, et qu’ils continuent toujours à y demeurer attachés. Si nous étions restés, en une certaine mesure, des hommes non scientifiques, quelle importance pourrions-nous encore attacher à la science ! Somme toute, et pour exprimer mon axiome dans toute son ampleur : pour un être purement connaisseur la connaissance serait indifférente. — Ce n’est pas la qualité de la foi et de la piété qui nous distingue des hommes pieux et croyants, mais la quantité : nous nous contentons de peu. Mais, nous répondront ceux-ci, — s’il en est ainsi soyez donc satisfaits et donnez-vous aussi pour satisfaits ! — À quoi nous pourrions facilement répondre : « En effet, nous ne faisons pas partie des mécontents ! Mais vous, si votre foi vous rend bienheureux, donnez-vous aussi pour tels ! Vos visages ont toujours nui à votre foi, plus que nos arguments! Si le joyeux message de votre bible était écrit sur votre figure vous n’auriez pas besoin d’exiger, avec tant d’entêtement, la croyance en l’autorité de ce livre : vos paroles, vos actes devraient sans cesse rendre la bible superflue, une nouvelle bible devrait sans cesse naftre de vous ! Mais ainsi toute votre apologie du christianisme a sa racine dans votre impiété ; par votre défense vous écrivez votre propre accusation, Si pourtant vous désirez sortir de cette insuffisance de votre christianisme, l’expérience de deux mille ans devrait vous amener à une considération qui, revêtue