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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

y mettaient toute la richesse de leur sagacité et de leur réflexion : tandis que nous employons notre esprit à la solution de problèmes qui ont plutôt en vue de réaliser l’absence de douleur et la suppression des sources du déplaisir. Pour ce qui en est de l’humanité souffrante, les anciens s’essayaient à s’oublier ou à faire virer leur sentiment, d’une façon ou d’une autre, vers le côté agréable. Ainsi ils s’aidaient de palliatifs, tandis que nous nous attaquons aux causes du mal et préférons en somme agir d’une façon prophylactique. Peut-être construisons-nous seulement les bases sur lesquelles les hommes édifieront de nouveau plus tard le temple de la joie.

188.

Les muses mensongères. — « Nous nous entendons à dire beaucoup de mensonges »[1]. — Ainsi chantèrent jadis les muses lorsqu’elles se révélèrent devant Hésiode. — On fait des découvertes importantes lorsque l’on se met à considérer l’artiste comme menteur.

189.

Homère sait être paradoxal. — Y a-t-il quelque chose de plus audacieux, de plus épouvantable et de plus incroyable, quelque chose qui éclaire les destinées humaines, tel un soleil d’hiver, autant que cette pensée qui se trouve dans Homère :

  1. Hésiode, la Théogonie, v. 29. — N. d. T.