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abstraction faite des influences des phénomènes de la nature, la démonstration d’une finalité décisive dans les événements qui embrasserait l’humanité tout entière. »

Or, le résultat de ce regard « objectif » jeté sur les choses doit précisément mettre en lumière une pareille finalité. C’est là une hypothèse qui, si l’historien l’érigeait en article de foi, ne pourrait prendre qu’une forme singulière. Il est vrai que Schiller voit parfaitement clair au sujet du caractère absolument subjectif de cette supposition, quand il dit de l’historien : « Un phénomène après l’autre commence à se soustraire à l’aveugle hasard, à la liberté sans règle, pour prendre rang, tel un membre qui s’ajuste dans un ensemble harmonieux — ensemble qui à vrai dire n’existe que dans l’imagination. » Que faut-il penser, par contre, de cette affirmation d’un célèbre historien virtuose, introduite avec tant de crédulité, et qui flotte entre la tautologie et le contresens : « Toute activité humaine est soumise à la puissante et incessante marche des choses, activité imperceptible, qui se soustrait parfois à l’observation » ? Dans cette phrase il n’y a pas plus de sagesse énigmatique que de folie non énigmatique. Elle ressemble à cette affirmation du jardinier de la cour dont parle Gœthe : « On peut peut-être forcer la nature, mais non pas la contraindre », ou bien à cette inscription d’une boutique de foire dont parle Swift : « Ici l’on