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d’aujourd’hui ? L’homme conclut que le sublime qui a été autrefois a certainement été possible autrefois et sera par conséquent encore possible un jour. Il suit courageusement son chemin, car maintenant il a écarté le doute qui l’assaillait aux heures de faiblesse et lui faisait se demander s’il ne voulait pas l’impossible. Admettons que quelqu’un soit persuadé qu’une centaine d’hommes productifs, élevés et agissant dans un esprit nouveau, suffiraient à donner le coup de grâce à l’intellectualisme aujourd’hui à la mode en Allemagne, combien sa conviction serait fortifiée s’il s’apercevait que la civilisation de la Renaissance s’élevait sur les épaules d’une pareille légion composée seulement d’une centaine d’hommes.

Et pourtant — que le même exemple nous apprenne quelque chose de nouveau — combien cette comparaison serait flottante et inexacte. Combien de choses passées, si ce retour en arrière doit avoir son effet fortifiant, devront être négligées ! L’individualité d’autrefois devra être déformée et violemment généralisée, débarrassée de ses aspérités et de ses lignes précises, en faveur d’une concordance artificielle. Au fond, ce qui a été possible autrefois ne saurait se reproduire une seconde fois, à moins que les pythagoriciens n’aient raison de croire qu’une même constellation des corps célestes amènerait jusqu’aux plus petits détails les mêmes événements sur la terre, de sorte que, quand les