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munion protestante, tandis que, dans le même temps, avec sa musique de Parsifal, il tendait les bras à tout ce qui est romain, ce flatteur de toutes les vanités, de toutes les obscurités, de toutes les prétentions allemandes qui allait s’offrir partout, — ce Wagner dernière manière serait-il le dernier et le plus haut sommet de notre musique et l’expression de la synthèse enfin réalisée de « l’âme allemande », l’Allemand par excellence ? — Ce fut au cours de l’été 1876 qu’à part moi j’ai abjuré cette croyance ; et c’est à ce moment que commença ce mouvement de la conscience allemande dont on découvre aujourd’hui des signes toujours plus sérieux, toujours plus précis, à ce moment que commença la décadence de la wagnérie.

12.

Pour la hiérarchie. — Peut-être est-il possible de révéler aujourd’hui déjà à quelle place doit être mis Wagner ; je veux dire qu’il n’appartient pas à la grande lignée des esprits originaux et véritables du plus haut rang, non à ce « sanctuaire des sanctuaires » olympien, d’où l’on voit, avec étonnement et avec une froideur sereine, livrer assaut de pareils plébéiens ambitieux et suants, lesquels semblent croire que la bonne volonté » et cette « sueur devant la vertu », dont a parlé avec un mauvais goût rural le paysan et poète grec Hésiode, suffisent à renverser l’éternelle et immuable hiérarchie des âmes, ou bien qu’il n’est même besoin que de « l’esprit mécontent qui vise sans cesse à du nouveau », dont Wagner a voulu faire son propre démon, Par contre, à Wagner I appartient un tout autre rang et un tout autre honneur et, de fait, ce n’est ni un rang inférieur ni un mince honneur. Wagner est un des trois génies de comédiens, en art par qui la foule, au cours de ce siècle (et ne sommes-nous pas au siècle des « masses  »  ?) apprit à connaître l’idée de « l’artiste ». Je veux parler de ces trois hommes singuliers et dangereux ;