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apparaît comme du dilettantisme de l’ordre le plus répréhensible ; qu’on n’ait même pas su en rire, cela peut paraître foncièrement allemand et fait partie du vieil et très germanique « culte de l’obscurité ». Mais si l’on veut à tout prix lui rendre aussi des honneurs et lui élever des statues comme à un « Penseur » — la bonne volonté, la soumission de ses partisans ne sauraient y manquer — en bien, je préconiserais de le représenter comme le génie de l’obscurité allemande en personne, tenant un flambeau d’où se dégagerait une épaisse fumée, enthousiasmé et trébuchant par-dessus une pierre. Quand Wagner pense, il trébuche !…

5.

Mais le musicien Richard Wagner ? — Wagner et encore Wagner, c’est aujourd’hui la devise…

6.

Avec tout cela, nous autres amis de la musique, nous sommes à bout de patience. Nous avons si longtemps fait la meilleure mine au mauvais jeu de la wagnérie ! À l’aide de toutes les vertus et de toutes les esthétiques, nous nous sommes convaincus et persuadés, durant un interminable jour de pluie, que le plus mauvais temps peut être du beau temps. « Combien de charme, nous sommes-nous dit, se trouve caché dans l’orage et dans les noirs nuages menaçants ! Comme la pluie s’entend à tomber sur la mélodie infinie ! Quel incomparable spectacle est celui d’un coup de foudre au milieu de l’interminable et grise tristesse ! Et le tonnerre donc ! » Mais, enfin, nous voulons voir de nouveau le ciel se dégager et, pour le moins, le beau soir que nous avons bien mérité, après une journée si vertueuse, mais si mauvaise ! — Vraiment ? Est-ce le soir ? Dejà le soir tombe-t-il ? Votre meilleur art, la musique, est-il, lui aussi, à son déclin ?… Mes amis, voici quelqu’un qui n’y croit plus. Nous