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amis. Il est singulier de pouvoir constater à quel point, durant toute sa vie, Wagner s’est tenu à l’écart de toute organisation de parti, mais chaque phase nouvelle de son art lui constituait un cercle de partisans, qui semblait n’avoir d’autre but que de le retenir dans cette plleseh ’ Maisil passa toujours au milieu de ses partisans sans ’ se laisser retenir ; de plus, sa carrière fut trop longue q pour que quelqu’un d’autre que lui ait pu la suivre dès · le début, elle fut aussi trop extraordinaire et trop béris— ’. sée d’obstacles pour que, même le plus fidèle, perdant le ’ souffle, ne restât en route. Presqueà toutes les époques de sa vie, Wagner se trouva en présence d’amis qui l’eus-·, sent volontiers érigé en dogme ; il en fut de même, pour d’autres raiscrns, de ses ennemis. Pour peu que la pureté ’ de son caractère artistique eût été moins prononcée, rien ’ n’eût été plus facile pour lui que de devenir plus tôt l’arbitre des questions littéraires et artistiques de notre époque —~ se qu’il a fini par devenir aujourd’hui, mais ’ · dans un sens beaucoup plus élevé, au point que tout ce qui se passe, dans un domaine quelconque de l’art, se, ’ voit involontairement traduit devant le tribunal de ses r conceptions artistiques et de sa probité intellectuelle. Il a subj ugué les volontés les plus antipathiques ; il n°y a plus un seul musicien de- talent qui ne lui prète l’oreille · dans son for intérieur et qui ne le juge plus digne d’être écouté que lui-même-et tout le reste de ce qui s’appel le musique. Quelques-uns de ceux qui veulent à tout prix signifier quelque chose par eux-mêmes luttent vraiment contre ce charme intérieur qui les subjugue ; ils se retranchent avec une application anxieusa dans le camp des anciens maîtres et préfèrent appuyer leur