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pire encore lorsque Pen prend l’art plus ou moins au sé ? ’ : icux, —que l’on exige de lui qu’il suscite une espèce de ’ I. faim et de désiret que l’on sïmagine que c’est sa mission de produire cette excitation factice. Comme si l’on crai- e ’gnait de périr du dégoût que l’on a devant soi-même et J de sa propre inertie, ont conjure tous i les mauvais de- · · mons, pour se laisser traquer"’par eux comme un gi- t bier aux abois ; on asoif de souffrance, de colère, de s »’-, ihaine, d’excitation, de frayeur subite, d’anxiété sans trêve ct1’on fait appel à l’artiste pour évoquer cette chasse irizl d’esprits infernaux. I ’

— iDans l’économie spirituelle de nos hommes cultivés, ’l’art est devenu un besoin tout à fait mensonger, méprisable, avilissant ; si ce n’est pas simplement rien, c’est du moins quelque chose de fort mauvais. L’artiste, le meilleur et le plus rare, ne voit rien de tout cela, car il Sem- Q ble être en proie àune sorte de rêve stupéfiant ; il répète en hésitant, d’une voix mal assurée, des mots magnifiques et étranges qu’il croit percevoir dans le lointain, mais’I ’dont il ne distingue pas clairement le sens. Quand, au contraire, il professe des tendances tout à’fait moder- · nes, l’artiste méprise chez ses nobles compagnons les tâétonnements-· et les discours ivres de rêve ; il tient en laisse toute la même glapissante des passions et des horreurs accouplées, pour les lâcher au besoin sur ses contemporains. Cor ceuxlci préfèrent se voir poursui- ·’ vis, blessés, et déchirés, plutôt que d’être’contraints à, vivre paisiblement, seuls avec eux-mêmeS.·SeulS 8VCü I¤ux-mêmes ! L’idée de cet isolement sufüt à plonger les âmes modernes dans la peur et, la terreur des spectres.

Lorsque je contemple, dans les villes populeuses, des