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AURORE

importune ! — Il n’y a là en présence que deux façons d’être importun — marions-nous donc !

388.

La fourberie en bonne conscience. — Il est extrêmement désagréable d’être exploité pour ses petites emplettes dans certains pays, par exemple dans le Tyrol, seulement parce que, en plus du mauvais marché, on est encore forcé de s’accommoder de la mauvaise figure et de la cupidité brutale du marchand coquin, ainsi que de la mauvaise conscience et de la grossière inimitié qui lui viennent à notre égard. À Venise, par contre, le berneur se réjouit de tout cœur du tour de fripon qui lui a réussi et n’en veut nullement au berné, il est même tout disposé à lui faire des amabilités et surtout à rire avec lui, pour le cas où celui-ci y serait disposé. — En un mot, il faut aussi avoir l’esprit et la bonne conscience de sa fourberie : cela réconcilie presque l’homme trompé avec la tromperie.

389.

Un peu trop lourds. — De très braves gens, qui sont un peu trop lourds pour être polis et aimables, cherchent immédiatement à répondre à une gentillesse par un service sérieux ou par une mise en action de leur force. Il est touchant de voir comme ils apportent timidement leurs pièces d’or, lorsqu’un autre leur a offert ses sous dorés.