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AURORE

364.

Choix de l’entourage. — Que l’on se garde bien de vivre dans un entourage où l’on ne peut ni se taire dignement ni faire connaître ses pensées supérieures, en sorte qu’il ne nous reste pas autre chose à communiquer que nos plaintes et nos besoins et toute l’histoire de nos misères. On devient ainsi mécontent de soi-même et mécontent de cet entourage, et l’on ajoute encore à la misère qui porte à se plaindre, le dépit que l’on ressent à être toujours dans la posture de l’homme qui se plaint. Au contraire, il faut vivre à un endroit où l’on a honte de parler de soi et où l’on n’en a pas le besoin. — Mais qui donc songe à de pareilles choses, à un choix dans de pareilles choses ! On parle de sa « destinée », on fait le gros dos et l’on soupire : « malheureux Atlas que je suis ! »

365.

Vanité. — La vanité est la crainte de paraître original, elle est donc un manque de fierté, mais point nécessairement un manque d’originalité.

366.

Misère du criminel. — Un criminel dont le crime a été découvert ne souffre pas de son crime, mais soit de la honte et du dépit que lui causent une bêtise qu’il a faite, soit de la privation de l’élément qui lui est habituel, et il faut être d’une rare