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COMPAGNONS DE CAPTIVITÉ.

vues vastes et ambitieuses de la Gironde. Dès la fin de 1792, il était déjà question de morceler l’Italie en petites républiques, de faire du Rhin la frontière de la France, d’arracher la hollande au stathouder et même de conquérir l’Égypte. Mon ami me mandait encore que, vu le mauvais état de la santé de Potocki et de Zakrzewski, on les avait placés de l’autre côté de la rivière ; que Sokolnicki s’était offert pour tenir compagnie à Zakrzewski, et qu’on avait permis à Libiszewski d’accompagner Wawrzecki qu’on amenait par un autre chemin.

C’est ainsi que nous charmions les ennuis de notre situation, quelquefois en nous écrivant, quelquefois en fredonnant ce que nous voulions nous communiquer, et quand nous avions à nous écrire plus au long, nous nous servions, encore d’un autre moyen que j’expliquerai plus bas. Mais hélas ! cette douce consolation pour moi ne dura guère longtemps. La femme de Mostowski, née princesse Radziwill, arriva à Pétersbourg , et mit tant de zèle à ses démarches, tourmenta tellement le favori de Catherine, Zubow, qu’elle obtint enfin de faire transférer son mari dans une prison plus salubre et plus spacieuse, où il fut mis ensemble avec Zakrzewski. Avant de nous séparer, il me promit de m’envoyer régulièrement des livres et de m’écrire avec de l’encre invisible