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mençait à déraisonner passablement, lorsque l’arrivée de trois gendarmes interdit tout à coup la délirante assemblée.

M. Le Blanc feignit d’en être consterné ; puis, s’adressant à ses gens, il demanda ce que voulaient ces messieurs. Alors un officier s’avance, et dit, en s’excusant de venir ainsi troubler la société, qu’il est porteur d’un ordre qui concerne un certain auteur nommé d’Aufreville, lequel doit se trouver parmi les convives.

— Que dit-il, s’écria au même instant un petit vieillard pâle et tremblant, que M. Dolivar s’empressa de faire taire, en lui disant d’un air sottement mystérieux ;

— Ne vous livrez pas.

— On vous a trompés, citoyens, répondit avec gravité M. Le Blanc ; personne ici n’a offensé le gouvernement et ne mérite…

— Cependant, monsieur, interrompit l’officier, il s’agit de vers très-audacieux contre l’autorité, et tout bon citoyen n’en peut protéger l’auteur.

— Maudite épître, murmurait à voix basse M. Le Blanc, j’avais bien prévu ce qu’elle lui coûterait.

Puis, se retournant vers l’officier :

— J’ignore de quel délit vous voulez parler, citoyen, mais vous trouverez bon que je n’en croie pas mes amis capables, et qu’à ce titre je ne les laisse pas arrêter chez moi.

— Oh ! ciel, que faites-vous ? s’écriait M. Dolivar, résister à la loi ! mais vous allez nous compromettre tous, mon cher Le Blanc ; il vaut mieux laisser M. d’Aufreville plaider lui-même sa cause, que de la gâter ainsi par des actes de violence.

— Je m’en moque, reprit M. Le Blanc ; il en arrivera ce qui pourra, mais je ne veux pas qu’on l’arrête ici.

— Ni moi non plus, dit Gustave en se levant pour aller protéger le petit auteur contre les gendarmes et la prudence de M. Dolivar.

Cet exemple de révolte est suivi par plusieurs personnes : on tombe sur les gendarmes ; M. Dolivar les défend ; Gustave, enchanté de pouvoir lui donner quelques taloches à la faveur du combat, s’en prend particulièrement à lui, et lui dit tout