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ne lui avais pas vu depuis plusieurs jours : madame a reposé deux heures, sa fièvre est moins ardente ; elle nous a tous reconnus ce matin, et à l’instant même elle témoignait l’envie de vous parler.

En finissant ces mots, Louise ouvrit la porte, et un enfant courut à moi pour me dire en levant sa petite main :

— Chut, maman dort !

— Non, elle ne dort pas, reprit Louise, mais c’est qu’Alfred est bien aise de vous répéter ce qu’on lui dit à chaque minute.

Et je regardai attentivement cet Alfred, qui me parut d’une beauté angélique. Madame de Révanne, qui me voyait l’admirer, me dit d’une voix que j’entendais à peine :

— N’est-ce pas qu’il est charmant ?

Ensuite elle me questionna sur son fils ; et comme je lui répondis qu’il ne guérirait pas tant qu’il n’aurait pas la preuve positive qu’elle-même était moins souffrante :

— Attendez, me dit-elle, je vais vous la donner.

Alors elle fit signe à Louise de mettre Alfred sur son lit, et lui dit en me montrant :

— Tu vois bien cet homme-là, c’est un ami qui va te mener chez quelqu’un qui te caressera, te donnera des bonbons, et que tu embrasseras bien fort pour moi.

— Oui, répondit Alfred, avec la joie qu’éprouve un enfant quand on lui promet un plaisir.

Et, se tournant vers moi, madame de Révanne ajouta :

— Dites à Gustave d’en croire ce petit messager, et de permettre qu’il me remplace en ce moment près de lui pour lui tenir compagnie, et lui ordonner d’être sage.

Avec quel ravissement je m’emparai de ce petit ange ! que j’étais fier de le porter à mon maître ! Louise nous suivit dans la crainte qu’il ne s’apprivoisât pas tout de suite avec nos visages inconnus, et puis elle avait bien un peu envie de voir comment il serait accueilli de Gustave. Je consentis à lui laisser ce plaisir ; mais ce fut à condition qu’elle resterait à la porte, et que j’entrerais seul avec mon précieux fardeau ; car j’étais jaloux du bonheur que j’allais causer.

Germain était resté auprès de mon maître ; je l’appelai, je